Les offensives de 1915.

La guerre de mouvement s'arrête autour de Novembre 1914. Un large front s'étend de la Suisse à la mer du nord; Les armées s'enterrent et commence la guerre des tranchées. L'explication de ce changement est assez simple, Comme l'ont démontré les pertes terribles de l'année 1914, l'armement de l' époque (et tout particulièrement la mitrailleuse) fait que la défense l'emporte sur l' attaque.

Les conditions de vie de cet hiver 1914 1915 sont terribles, les armées n'étant pas préparées à la vie dans les tranchées. Les soldats s'adaptent comme ils peuvent.
Dans l'armée Française, de nouveaux uniformes font leur apparition; de couleur bleu horizon, ils font disparaître les anciens uniformes aux pantalons et casquettes rouges si anachroniques et surtout si dangereux.

Malgré les pertes subies en 1914, Le haut commandement Français, et plus particulièrement le général Joffre, mise sur une victoire assez rapide par une offensive générale. Les Allemands, par contre, sont dans une logique résolument défensive sur le front de l'Ouest; le haut commandement Allemand s'est d'ailleurs installé sur le front de l' Est, et c' est là qu' est porté leur effort de guerre en cette année 1915. Sur le front de l'Ouest donc, l'armée allemande se limite à lancer des contre-offensives pour récupérer le terrain perdu lors des offensives Françaises.

L' année 1915 se caractérise donc sur le front Ouest par deux séries d'offensives Françaises en Champagne et en Artois et par une série incessante de combats locaux dit "de grignotage"

I) Les premières offensives (Champagne, Artois)

a) La première offensive en Champagne

Résolus à arrêter l'avance française en Champagne, les Allemands ont établis une solide ligne de défense sur les plateau au Nord de la vallées de la Tourbe et de la Suippes;
L'offensive est lancée le 16 Février, sur un front de 8 kilomètres; elle se poursuit jusqu'au 15 Mars. Les assauts se succèdent, mais les avancées minimes alternent avec les temps d'arrêt dus aux violentes contre-attaques allemandes.
Les rigueurs de l' hiver, les successions de gel et de dégel ont transformé le front en un immense bourbier
avec le tombée de "Bois sabot", l' offensive est stoppée avec un bilan terribles: des gains de terrains minimes pour une perte de 100 000 hommes pour la IV. armée !
Il est à noter que le régiment de Domingo, bien que cantonné à une dizaine de kilomètres de front de Champagne n'a pas participé à cette offensive.

b) Au Printemps, l' offensive en Artois

Si les Allemands ont pu, en Champagne se rétablir sur une position délibérément choisie, il n'en est pas du tout de même au nord de la Somme, ou le front s'est stabilisé au gré des événements de la course à la mer. La ligne de défense s'est donc établi en fonction des obstacles naturels.
Le général Foch commande le groupe d'armées du Nord. un vaste offensive commence. L'objectif principal est la crête de Vilmy, qui domine toute la plaine de Lens.
L'attaque commence le 9 mai à 10 heures.
L'offensive est dans un premier temps une réussite, et la crête de Vilmy est enlevé d'un seul bond, mais l'absence de réserve (elle sont stationnées à 12 Km du front) ne permet pas aux tirailleurs marocains et à la légion de faire face à la violente contre-attaque allemande: La position est évacuée et le terrain perdu. Durant tout le mois de mai, de terribles combats auront lieu pour la possession des villages aux alentours (Notre Dame des Lorettes, Carency, Ablain, Neuville etc...).
En règle générale, l'armée Allemande fait preuve de plus de pragmatisme que l'armée Française, abandonne plus facilement les positions tenues, mais procèdent systématiquement à de violentes contre-attaques pour gagner le terrain perdu.
Le 16 Juin, 20 divisions montent à l'assaut de la crête, mais les troupes, épuisés, échouent.
Le 24 Juin, le haut commandement arrête les opérations. 

II) Les combats de grignotage.

Outre les grandes offensives, d'incessants combats "locaux" auront lieu tout au long de l' année 1915.
L'intensité et la durée de ces combats face au relatif peu d'intérêt stratégique, comme par exemple dans la foret d'Argonne, étonne. D'autres témoignent d'un certain cynisme; c' est le cas de cette attaque menée en champagne par les 5ème, 6ème et 7ème compagnies du second bataillon du 51ème R.I. dont le but unique est de mettre à jour les positions de mitrailleuses allemandes; les trois compagnies sont massacrées, 300 soldats et 7 officiers y perdent la vie...

La crête des Eparges, elle, représente un intérêt stratégique bien réel: en effet, ce promontoire au dimensions réduites ( 1500 mètre de long pour 750 mètres de large) domine la plaine du Woëvre et les Allemands y ont établit une ligne de défense. L' attaque Française se traduit au début par une terrible guerre de mines; le relief est encore aujourd'hui marqué par les cratères provoqués par l' explosion de celles-ci. Au mois d' Avril, après une violente offensive Les Français réussissent  à avancer, sans toutefois conquérir le point X, objectif final. Ces combats sont décris par Maurice Genevoix dans "Ceux de 14",  Celui-ci est grièvement blessé fin Avril. C'est à ce moment que le régiment de Domingo Ouret monte en première ligne, pour garder les positions chèrement acquises. Le point X ne sera conquis par les Américains qu'en 1918.

III) La grande offensive d' hiver.

Ne tenant aucun compte des échecs précédents, Joffre, contrairement à l' avis de Foch décide de relancer une grande offensive générale, sur les deux fronts précédents (En Champagne et en Artois), mais avec cette fois plus de moyen et sur des fronts plus importants. Les stocks de munitions ont été reconstitués et l' effectif Français permet d' aligner 100 divisions auxquelles s' ajoutent 50 divisions britanniques (21 sur le front en France, le reste en instruction).
La  répartition ce fait de la manière suivante: 35 divisions sous les ordres de Castelnau, de De Langle et de Pétain et 1 100 pièces lourdes d' artillerie en Champagne, déployées sur 25 Km, et 31 divisions dont 13 Britanniques sous l' autorité de Foch et de French, appuyées par 700 canons de 75 et par 300 pièces lourdes. De plus 12 divisions d' infanterie et 15 de cavalerie sont tenues en réserve pour exploiter un succès considéré comme assuré.
Une forte préparation d' artillerie commence le 20 septembre en Artois et le 22 en Champagne, annonçant l' offensive générale

a) La seconde offensive d'Artois

Après un bombardement au gaz les anglais prennent les premières lignes allemandes et menacent Lens; les français retardés par le brouillard, attaquent plus tard et progressent sur 6 km.
Les résultats semblent prometteurs pour Foch, mais très vite, Joffre fait savoir que la situation en Champagne ne permet pas d' alimenter la bataille en Artois, et après les prélèvements de troupes et de munitions pour le front désormais prioritaire de Champagne, l' offensive en Artois se transforme en diversion.

b) L' action principale en Champagne

l' attaque débute le 25 septembre sous une pluie diluvienne qui durera jusqu'au 29. La préparation d' artillerie c' est effectué dans "de bonne conditions" climatiques, et la première position allemande est défoncée.
Les résultats de la première journée sont brillants: presque toute la première ligne est prise d' un seul bond.
Le 26, l' attaque prend contact avec la seconde ligne allemande; celle-ci se révèle d' une puissance insoupçonné et tout les efforts répétés les 27 et 28 septembre par les assaillants sont impuissants à l' entamer. Une nouvelle préparation d' artillerie s' avère nécessaire et début Octobre il faut se rendre à l' évidence: l' attaque est un échec. Le 1er novembre, devant l' épuisement des troupes, l' importance des pertes (138 000 hommes), et la consommation des munitions excédent toute prévision, l' ensemble des opérations est arrêté.

Bilan de l' année 1915

Faire le bilan de l' année 1915, c' est se poser la question de la bouteille demi vide ou demi pleine.
Les Français et Anglais ont échoués dans leur tentative d' offensive décisive et ont saigné à blanc leurs troupes mais ont aidé de manière décisive leurs alliés Russes; Les Allemands ont gagné d' importants territoires sur le front de l'Est et ont en outre brillamment tenus leurs positions sur le front de l' Ouest. Mais cette défense acharnée a nécessité le déplacement de 10 divisions vers l' Ouest qui ont fait cruellement défaut pour exploiter les victoires contre les armées du Tsar: Le haut commandement Allemand doit définitivement renoncer à une victoire rapide à l' Est , et devra s' accommoder d' un lutte sur deux fronts.
En 1915, l' infanterie Française, énormément sollicitée, est saignée à blanc les pertes sont énormes, pour un résultats bien maigres (mais à tout bien réfléchir, quel année n'a pas été marqué par un nombre effroyable de morts; si les massacres du début de la guerre avait eu pour cause principale une conception quasi Napoléonienne de l' attaque à outrance,en 1915, c'est plutôt dans une volonté obsessionnelle d'effectuer une percée décisive devant mener directement à la victoire finale.
En cette année 15, La guerre bascule dans "la modernité" et le XXème siècle: La guerre de tranchée qui s'installe donne une place de plus en plus prépondérante au matériel, l'artillerie devient primordiale (chez Foch par ex.), armes chimiques, mines, aviation la guerre ce "perfectionne".